
Par Fadi Kassem et Georges Gastaud [1]- 10 septembre 2025 – Avant même que démarre le mouvement populaire du 10 septembre, le gouvernement Bayrou et son plan de super-austérité (pour les pauvres !), de surarmement et de marche à la guerre continentale, ont été sèchement censurés par les députés. Soumis à la pression des masses, la fausse « gauche » du PS et les faux patriotes du RN n’ont pu faire autrement cette fois que de voter la censure. Rien que par l’annonce d’un blocage du pays par les travailleurs en colère, le mouvement populaire a donc déjà obtenu davantage qu’ont obtenu (en réalité, RIEN) à propos des retraites les X journées saute-mouton organisées par l’Intersyndicale pilotée par la direction jaune de la CFDT [2].

Bien entendu, le pouvoir oligarchique dirigé par l’archi-minoritaire Macron ne reste pas passif face à une crise de régime aiguë qui menace à la fois la Vème Irrépublique en bout de course et qui fragilise à terme (car la revendication du Frexit progressiste a de plus en plus de vent dans les voiles…) ses mentors de l’UE-OTAN. Or, comme nous l’avons toujours dit au PRCF, la France est un, voire LE maillon faible de cette funeste « construction » euro-atlantique qui conduit une politique continentale d’austérité, d’arasement des souverainetés nationales (marche à l’ « Etat fédéral européen » belliciste et fascisant de plus en plus centré sur Merz). Si bien que la mise hors d’état de nuire du Macronat (pour commencer…) porterait un coup très dur à la dynamique continentale ultraréactionnaire de l’UE-OTAN et à son « économie de guerre » extrêmement dangereuse pour la France et la paix.
C’est pourquoi la nomination du sinistre Lecornu à Matignon n’est pas seulement une provocation caractérisée contre le mouvement populaire et contre les électeurs du Nouveau Front populaire arrivé en tête aux législatives 2024 (quoi qu’on pense par ailleurs de la politique inconséquente de ce NFP euro- et OTAN-compatible). Cette nomination est aussi un bras d’honneur au PS qui, non content d’avoir saboté le NFP, était prêt à occuper Matignon pour tenter de repeindre en rose la politique macroniste de guerre et d’austérité. Mais surtout, cette nomination à Matignon de l’ex-ministre de la guerre Lecornu, ce personnage débridé et ultra-belliqueux qui a même osé envoyer des navires de guerre français narguer la Chine populaire dans l’Indo-Pacifique, est avant tout un message adressé par Macron à l’oligarchie européenne : coûte que coûte, l’Elysée entend continuer sa guerre interne contre le monde du travail assortie d’une marche à la guerre potentiellement suicidaire, voire contre le mouvement mondial des BRICS qui conteste l’hégémonie suprémaciste mondiale de l’ « Occident ». Et pour cela, quoi de mieux qu’un Retailleau au ministère de l’Intérieur qui, alors même que ce gouvernement démissionnaire n’a plus la moindre légitimité, exige de sa police « tolérance zéro » sur les blocages, déclare que l' »ordre » n’a plus à s’embarrasser de l’état de droit, et qui déploie aujourd’hui 80 000 policiers pour matraquer les travailleurs en colère. La fascisation de la France, assortie d’une possible et prochaine victoire de l’extrême droite déjà alliée à la droite pseudo-« républicaine » (avec le caricatural Eric Ciotti par exemple) est donc en passe de franchir un seuil périlleux. N’oublions pas en outre que l’actuelle Constitution néo-bonapartiste donne à tout moment le « droit » au président en titre de recourir à l’Article 16 qui instaure de fait la dictature policière dans le pays. Décidément, quelle belle démocratie que cette Cinquième « République » à bout de souffle et auto-asservie au CAC-40, à l’UE et à l’OTAN !

Face à cette néfaste évolution, il ne s’agit pas de trembler car le recours à de telles méthodes est avant tout le signe de ce que Gramsci appelait une « crise du consentement populaire ». De moins en moins, pour parler comme Lénine, « ceux d’en haut ne peuvent gouverner comme avant » tandis que « ceux d’en bas ne veulent plus être gouvernés comme avant« . De plus en plus la France, n’en déplaise à l’euro-réformisme plat de la « gauche » établie, va tanguer fortement entre un risque accru de fascisme, c’est-à-dire, sans barguigner sur les définitions académiques, de dictature ouverte et violente de l’oligarchie capitaliste, et une irrépressible remontée des aspirations révolutionnaires. C’est d’autant plus vrai que, comme nous n’avons cessé de l’écrire, « Marianne ne consent plus! » [3] au viol provocant et répété de la démocratie [4] et que notre pays reste encore pour une part, comme disait Marx, « la terre classique des luttes de classes menées jusqu’au bout« .
Pour « tenir » et gagner, il faudra certes que le peuple et la jeunesse en lutte déjouent les provocations que la droite dure en place ne cessera de monter contre eux. Mais il faudra surtout de la clarté politique. Oui, il faut le départ de Macron sous les huées populaires. Mais au-delà de cet individu et de son clone belliciste de Matignon, c’est l’ensemble de la politique oligarchique qu’il faudra démonter et ce sera impossible sans mettre frontalement en cause à la fois :
- l’euro, cette machinerie infernale qui, depuis des décennies, plombe les services publics, la protection sociale et le « produire en France »,
- l’OTAN, qui nous mène vitesse V à une guerre suicidaire avec la Russie,
- l’UE, cette prison des peuples qui est aussi un rempart oligarchique à l’Europe des luttes qui monte,
- et bien entendu, le capitalisme, ce système malfaisant, périmé et proprement exterministe qui « épuise la Terre et les travailleurs » (Marx) pour défendre les privilèges d’une poignée de magnats.
En outre, loin d’opposer le mouvement spontané des masses aux partis politiques et aux syndicats « en général », il faut, tout en dénonçant les trahisons de la fausse « gauche » et en soutenant la plus large démocratie populaire, reconstruire un parti communiste de combat, relancer le syndicalisme de classe qui fut l’orgueil de la CGT, favoriser l’émergence d’un Front pour la Résistance et l’Alternative Populaire portant toutes les dimensions de la contre-offensive anti-oligarchique : sauvegarde et relance du progrès social, défense de la paix, reconquête de la souveraineté nationale et populaire, élargissement de la démocratie populaire et, corrélativement, mise hors d’état de nuire du fascisme, de l’extrême droite et des menées oligarchiques sous toutes leurs formes.
Tôt ou tard, naîtra, dans ces luttes et nourri par elles, le projet d’un socialisme-communisme de nouvelle génération qui rendra au mouvement ouvrier et populaire toute la force motrice d’un grand idéal transformateur. Et c’est à tout cela que contribuent de toutes leurs forces les militants et militantes du PRCF.
[1] Fadi Kassem et Georges Gastaud sont respectivement secrétaire national du PRCF et directeur politique d’Initiative communiste
[2] Dont l’apport majeur à la défaite de Bayrou et de son plan aura été… de le recevoir avec les honneurs lors de la rentrée « militante » (si peu…) de la Centrale du bien nommé « Berger ».
[3] Pamphlet de G. Gastaud, 2023 – A commander à l’auteur. Cf aussi du même auteur, la Lettre ouverte aux « bons Français » qui assassinent la France, Temps des cerises 2005.
[4] Dont les dernières manifestations les plus voyantes auront été le viol du Non à la constitution européenne (2008) par les complices Hollande et Sarkozy, le massacre policier des Gilets jaunes, et plus récemment, la répression frappant les secteurs ouvriers (pétrochimie, énergie…) du mouvement sur les retraites.