
jeudi 8 mai le film américain de 1961 de Stanley Kramer : Jugement à Nuremberg, avec Spencer Tracy, Burt Lancaster, Richard Widmark, Marlene Dietrich, Maximilian Schell, Judy Garland était diffusé par Arte, un film à voir en ligne également jusqu’au 13 mai.
Le film n’a que 2 étoiles les programmes télé, bien qu’il décrit, au tribunal de Nuremberg en 1948, le procès de 4 juges ayant exercé durant le régime nazi et s’étant pliés à ses règles bien particulières… Tous les aspects sont posés, l’anticommunisme est explicité, y compris pour certains des juges de l’armée américaine chargés d’instruire le procès contre des collègues professionnels allemands.
Le film est exceptionnel sur le sujet pour un film tournée à Hollywood, dont ont connais le contexte de chasse aux sorcières, remarquablement joué et mis en scène.
Les 4 juges sont condamnés à la prison à vie. A la fin, un bandeau indique simplement, qu’après le cours de l’instruction et du procès (2 à 3 ans derrière les barreaux), l’emprisonnement à vie ne se fera pas du tout. La conclusion du film met exceptionnellement en valeur les glissements idéologiques en train d’émerger.
Des scènes de rue sont montées avec des arrières-plans des villes allemandes (Berlin ?) détruit.
https://www.arte.tv/fr/videos/047055-000-A/jugement-a-nuremberg
Un juge américain débarque à Nuremberg pour présider le procès de magistrats du régime nazi. Avec un aréopage de stars hollywoodiennes (Spencer Tracy, Burt Lancaster, Richard Widmark…) et un Maximilian Schell oscarisé, un très grand film de prétoire, qui explore avec acuité la responsabilité en temps de dictature.
En 1947, un an après le procès des grands criminels de guerre nazis. Dans un Nuremberg en ruines, Dan Haywood, un vieux juge américain, vient présider le tribunal militaire devant lequel doivent comparaître à leur tour des magistrats allemands impliqués dans les horreurs commises au nom de la loi du IIIe Reich – stérilisation des handicapés mentaux et ségrégation raciale. Sur le banc des accusés, deux exécutants, un suppôt zélé du régime et Ernst Janning, juriste respecté et coauteur de la Constitution de la République de Weimar, avant d’être nommé ministre de la Justice de Hitler. Alors que le colonel Tad Lawson, hanté par sa découverte des camps de concentration, porte l’accusation, Hans Rolfe, brillant avocat, assure la défense.
(Mauvaise) conscience
D’une ample maîtrise cinématographique, ce film-fleuve très documenté, tourné en pleine guerre froide par Stanley Kramer, et presque intégralement dans le huis clos du prétoire, livre une saisissante plongée dans les enjeux d’un procès dont il n’occulte rien de la complexité. Car au-delà de la dimension historique, le cinéaste explore, à travers une dramaturgie qui jamais ne faiblit, les tréfonds de l’âme humaine autant que la question éthique et politique de la soumission en temps de dictature. Des débats incarnés par des acteurs stars, tous au sommet de leur art : Spencer Tracy en juge honnête parce que pétri d’incertitudes – ou l’inverse ; Burt Lancaster en ministre (fictif) à la haute silhouette cloîtrée dans son mutisme ; Richard Widmark, dont la rage fiévreuse enflamme la salle ; Montgomery Clift, victime brisée ; ou Maximilian Schell, oscarisé pour le rôle, en avocat à la parole acérée qui renvoie avec brio chacun à sa (mauvaise) conscience. Servir un État criminel relève-t-il logiquement du crime ? Ce tribunal condamne-t-il, au travers de ces magistrats qui ont appliqué des lois scélérates en détournant le regard de leurs conséquences, le peuple allemand tout entier ? Où placer la frontière entre culpabilité et responsabilité ? Pourquoi ne pas interroger aussi le rôle des alliés ou du Vatican qui ont, au pire, collaboré, au mieux, laissé faire en sachant ? Après Nagasaki et Hiroshima, de quelle légitimité les Américains sont-ils investis pour instruire la justice internationale ? Et que vaut leur clémence – infusée de Realpolitik face à l’ennemi soviétique –, à l’égard de dignitaires allemands qui ne purgeront pas leur peine ? À Ernst Janning tentant, après la confession de son aveuglement, d’expliquer qu’il n’avait pas mesuré l’ampleur du désastre à venir, le juge corrige : »On en est arrivés là la première fois que vous avez condamné à mort un homme que vous saviez innocent. » Avec une séquence où Marlene Dietrich, digne veuve de général, fredonne Lili Marlene, un grand film, dont la lucidité résonne avec force dans le désordre mondial.