
Majoritairement, les voix artistiques accompagnent la propagande impérialiste. Ce n’est pas le cas de la « chaîne des poètes pour la paix ». Certes, « tous ne partagent pas les mêmes analyses, les mêmes points de vue sur toutes ces guerres ». Mais ils expriment leur émotion et leur refus « d’une troisième guerre mondiale qui risquerait d’être fatale à l’Humanité ». Ils ont publié en 2024 le recueil multilingue : « Halte au feu ! » Le Pôle de Renaissance Communiste en France soutient donc la manifestation Respaix prévue les 19, 20 et 21 septembre à la Courneuve
RESPAIX : meeting des poètes pour la paix
« L’homme, c’est le monde de l’homme », disait le philosophe.* A voir précisément l’état du monde qui est le nôtre, force est de se dire – ce que nous savons depuis toujours mais que ce début de XXIe siècle rend plus évident encore – que notre espèce est capable du meilleur comme du pire.
Nous pouvons explorer les trous noirs de l’univers mais nous laissons s’agrandir autour de nous et en nous des trous noirs qui s’ouvrent sous nos pieds et dans notre propre conscience et qui peuvent nous engloutir.
Tout se passe actuellement comme si le droit international, qui s’était à peu près imposé après les deux guerres mondiales, n’existait plus. C’est le règne de la loi du plus fort. Dans tous les domaines. La coexistence pacifique est oubliée et la guerre est à nouveau considérée comme normale ; dans l’économie, comme dans les rapports entre Etats, voire dans les relations entre individus. On peut envahir un pays voisin, envoyer la jeunesse à la mort et massacrer des civils.
On peut organiser un génocide, affamer et assoiffer délibérément des millions d’êtres humains, hommes, femmes, enfants, dans le but de les faire disparaître ou de les contraindre à l’exil.
Le racisme le plus bestial, qui consiste à dénier à l’autre jusqu’à sa qualité d’être humain, est à nouveau ouvertement prôné par des hommes d’Etat.
Plus généralement, personne ou presque ne prend plus en considération le droit des peuples à l’auto-détermination ; ce qui serait pourtant un élément essentiel à la résolution de bien des conflits.
Au moment où le réchauffement planétaire apparaît évident et où les incendies et les catastrophes climatiques se multiplient à la surface de la Terre, les pays les plus développés, au lieu de se mobiliser pour faire face ensemble aux défis communs de l’humanité, s’engagent dans une nouvelle course aux armements.
C’est bien sûr le moyen de relancer les affaires, mais ce n’est pas que cela.
Face à l’émergence de nouvelles puissances, et à un déclin relatif des anciens empires, il s’agit à nouveau de se partager le monde et ses richesses.
Mais aussi, par la militarisation des esprits, de juguler les protestations contre la corruption et les injustices qui soulèvent l’indignation des opinions publiques.
Vu l’accumulation démentielle des armes, notamment nucléaires, le moindre de ces conflits peut nous entraîner vers une nouvelle conflagration mondiale. La puissance que l’humanité détient entre ses mains est telle qu’elle peut sans doute surmonter ses problèmes les plus difficiles mais aussi s’auto-détruire et détruire ses propres conditions d’existence.
Mais il n’est pas écrit dans les étoiles que l’humanité est prête à se suicider.
En tant que poètes, écrivains, artistes, hommes et femmes de langage nous savons que c’est par la parole que nous accédons à l’humanité. Et c’est par la parole que l’humanité peut se sauver. Il faut que la force du langage se substitue au langage de la force, que le dialogue l’emporte sur le monologue inégalitaire et meurtrier des armes.
Nous savons que toutes les guerres qui visent à modifier les rapports de force s’achèvent obligatoirement par des discussions. Mais nous refusons que la vie des enfants, des femmes, des hommes passe par pertes et profits. Bien sûr, un poème, une chanson ne peuvent pas arrêter un missile. Mais nous ne sommes pas sans pouvoir. Nous pouvons dire la vérité, dénoncer les coupables et redonner un peu de vigueur aux raisons d’espérer. Nous sommes ici non seulement pour sauver l’honneur, mais aussi pour que s’affirme un courant culturel pro-paix. Face à la guerre, face à l’échec de la mondialisation ultra-libérale qui engendre partout la montée du chauvinisme et du néo-fascisme, nous pouvons faire vivre l’idée que nous appartenons tous à la même nation, multicolore et solidaire, des habitants de la Terre.
Ce Peuple-monde, conscient de son destin commun, n’existe encore qu’à l’état virtuel, comme un futur possible de l’humanité. En vérité, comme sa seule possibilité d’avenir.
Et pour que cet avenir advienne, nous disons, aujourd’hui : « Oui, nous qui venons de différents coins du monde et nous retrouvons ici, nous sommes partie prenante du Peuple-monde ».
Francis Combes
* Karl Marx : in Contribution à la critique de la Philosophie du droit de Hegel.
RESPAIX: Meeting of Poets for Peace
« Man is the world of man, » said the philosopher.*
Considering the precise state of the world we live in, we are forced to realize—something we have always known, but which the beginning of the 21st century makes even more evident—that our species is capable of the best as well as the worst.
We can explore the black holes of the universe, but we allow black holes to expand around us and within us, opening beneath our feet and in our own consciousness, and capable of engulfing us.
Everything is happening today as if international law, which was more or less imposed after the two world wars, no longer exists. It is the reign of the law of the strongest. In all areas. Peaceful coexistence is forgotten, and war is once again considered normal; in the economy, as in relations between states, even in relations between individuals. We can invade a neighbouring country, send young people to their deaths, and massacre civilians.
One can organize genocide, deliberately starve and thirst millions of human beings—men, women, and children—with the aim of making them disappear or forcing them into exile.
The most brutal racism, which consists of denying others their very human status, is once again openly advocated by statesmen.
More generally, almost no one takes into consideration the right of peoples to self-determination; this would nevertheless be an essential element in resolving many conflicts.
At a time when global warming is becoming evident and fires and climate disasters are multiplying across the Earth’s surface, the most developed countries, instead of mobilizing to jointly address humanity’s common challenges, are engaging in a new arms race.
This is, of course, a way to revive business, but it’s not just that.
Given the insane accumulation of weapons, especially nuclear weapons, the slightest of these conflicts could lead us toward a new global conflagration. The power humanity holds in its hands is such that it can undoubtedly overcome its most difficult problems, but also self-destruct and destroy its own conditions of existence.
But it is not written in the stars that humanity is ready to commit suicide.
As poets, writers, artists, men and women of language, we know that it is through words that we access humanity. And it is through words that humanity can save itself. The power of language must replace the language of force, and dialogue must prevail over the unequal and murderous monologue of weapons.
Faced with the emergence of new powers and the relative decline of old empires, it is once again a matter of sharing the world and its wealth.
But also, through the militarization of minds, of curbing protests against corruption and injustices that arouse public outrage.
We know that all wars aimed at changing the balance of power necessarily end in discussions. But we refuse to allow the lives of children, women, and men to be wasted.
Of course, a poem or a song cannot stop a missile. But we are not powerless. We can speak the truth, denounce the guilty, and restore a little vigor to the reasons for hope. We are here not only to save honor, but also to assert a pro-peace cultural movement.
In the face of war, in the face of the failure of ultra-liberal globalization, which everywhere engenders the rise of chauvinism and neofascism, we can uphold the idea that we all belong to the same nation, multicolored and united, the inhabitants of the Earth.
This World People, aware of its common destiny, still exists only virtually, as a possible future for humanity. In truth, as its only possible future.
And for this future to come about, we say today: « Yes, we who come from different corners of the world and find ourselves here, we are part of the World People. »
Francis Combes
* Karl Marx: in Contribution to the Critique of Hegel’s Philosophy of Right.