Le Sénat a donc adopté le 18 juillet dernier le projet de loi renforçant la sécurité intérieure et la lutte contre le terrorisme. En clair, un texte intégrant de façon permanente les dispositions d’exception, liberticides, d’un état d’urgence tout entier tourné contre le mouvement social. C’est un pas de plus qui intervient dans la fascisation d’un régime, qui intervient au moment même où le gouvernement de Macron, entend imposer par la force et sans aucun débat, à coup d’ordonnances, le saccage du code du travail. Afin de satisfaire aux ordres de l’Union Européenne et du grand patronat, chacun peut ainsi bien comprendre que les mesures liberticides – dont les effets tangibles ont montré qu’elles étaient essentiellement utilisées pour interdire des manifestations et réprimer des opposants politiques tandis que les attentats terroristes ont eux continué de faire des centaines de victimes – sont de fait renforcées pour mater par la force les éventuels mouvements de contestation.
Le 17 juillet, la LDH, l’une des principales ONG de défense des droits de l’Homme montait au créneau :
Paris, le 17 juillet 2017.
Projet de loi renforçant la sécurité intérieure et la lutte contre le terrorisme
Lettres et avis de la LDHMadame la Sénatrice,
Monsieur le Sénateur,
Vous allez délibérer sur le projet de loi renforçant la sécurité intérieure et la lutte contre le terrorisme. Ce projet inscrirait dans le Code de la sécurité intérieure de nouvelles normes et dispositions particulièrement significatives en termes de droits et de libertés. Elles sont inspirées pour la plupart de celles, prévues pourtant comme exceptionnelles et temporaires, qui sont en cours dans le cadre de l’état d’urgence.
La Ligue des droits de l’Homme, avec d’autres associations, des avocats et des juristes, a justifié son opposition à une sixième reconduction de l’état d’urgence et à son application à l’identique jusqu’en novembre 2017, par les abus et les dérives constatés, par l’absence d’un bilan précis de ses résultats, et par le fait qu’il instaure une préjudiciable logique du soupçon avec une stigmatisation d’une partie ciblée de la communauté nationale.
Avec de nombreuses institutions, à l’exemple du Défenseur des droits et de la Commission nationale consultative des droits de l’Homme dont les critiques sont explicites, la LDH est particulièrement inquiète des mesures envisagées dans le projet de loi présenté par le gouvernement qui entend traduire dans le droit commun des mesures exceptionnelles qui portent gravement atteinte à l’Etat de droit et aux libertés fondamentales.
S’il est légitime d’agir fermement contre le terrorisme, la LDH reste convaincue qu’il est nécessaire de s’appuyer sur la force de notre démocratie et de nos institutions, sans céder sur leurs principes ni sur l’équilibre des pouvoirs. Elle considère que le droit existant, qui a déjà été fortement renforcé en la matière après les multiples modifications législatives intervenues ces dernières années, est largement opérationnel et a fait ses preuves, sous le contrôle du juge judiciaire, garant des libertés.
Afin de vous préciser notre position sur ce nouveau texte en débat, la LDH vous propose ci-joint une analyse juridique détaillée des principales dispositions envisagées avec les critiques qui peuvent en être faites au regard notamment de la Convention européenne des droits de l’Homme, des principes constitutionnels et des décisions ou avis du Conseil d’Etat.
La LDH espère que ce travail précis saura éclairer votre choix et vous permettra de prendre la mesure des enjeux en termes de droits et de libertés. Compte tenu des circonstances, vous comprendrez que nous rendions cette lettre publique.Restant à votre disposition, je vous prie d’agréer, Madame la Sénatrice, Monsieur le Sénateur, l’expression de mes salutations respectueuses.
Malik Salemkour
Président de la LDH