Une délégation du Parti Communiste d’Ukraine (KPU) était présente à l’invitation des camarades britanniques pour participer au 54e congrès du parti communiste de Grande Bretagne (CPB) le 20 novembre dernier. Le journal du CPB le célèbre Morning Star a publié le témoignage des camarades ukrainiens qui subissent une violente répression de la part de la junte fasciste. Cette junte installée à la faveur du coup d’état de Maidan provoquée et soutenu par l’Union Européenne et les USA s’est lancée dans une vaste chasse aux sorcières, interdisant le parti communiste et sa presse, pourchassant ses militants et avec eux l’ensemble des forces antifascistes.
Journées noires pour les forces progressistes en Ukraine – Morning Star
La semaine dernière, l’ONU a voté une résolution condamnant la glorification du nazimes et des pratiques encourageant le racisme et l’intolérance.
L’ONU a été créé à la suite de la défaite du nazisme. Alors que la seconde guerre mondiale s’achevait, une déclaration de guerre contre les puissances de l’Axe, l’Allemagne Nazie, l’Italie Fasciste et le Japon impériale était un pré requi pour rejoindre l’ONU en gestation.
La vision de ses fondateur – que la coopération plutôt que la compétition entre les pays pouvait fonctionner et que les conflits ne devaient pas être résolus par une confrontation violente – reposait sur un rejet des principes fasciste, om les plus forts dominent et les plus faibles sont exterminés.
Donc pour les membres de l’ONU soutenir cette résolution n’était pas un casse tête. Seulement trois pays se sont révélés vouloir voter contre : les USA, l’Ukraine, et le tout petit archipel de Palau dans le pacifique. Le vote de Washington vise à protéger son allié ukrainien. Plus de 40 pays – la plupart des membres de l’Union Européenne, dont la honteuse Grande Bretagne – se sont abstenus, à nouveau parcequ’ils ont considéré cette résolution comme une attaque contre l’Ukraine.
Mais pourquoi ? un résumé des événement en Ukraine depuis le coup d’état soutenu par l’occident en 2014 est éclairant. Les protestations de « Maidan » qui ont fait tomber le gouvernemetn Yanukovitch ont été décrite à l’ouest comme une révolte populaire contre un régime corrompu.
La vérité est en réalité un peu plus compliquée. Yanukovithc, bien que corrompu, avait été élu, et le mouvement de rue qui la évincé du pouvoir était dominé par des ganges fascistes et néonazis.
Les communistes ukrainiens reconnaissent que beaucoup de gens sont venus manifester parcequ’ils en avaient marre de la corruption, qu’ils voulaient des augmentations de salaires et de meilleurs conditions de vie et pensaient que les choses pourraient ainsi changer.
Mais en réalité, le soutien a presque exclusivement était apporté par les parties occidentales du pays. Ukraine – un pays qui n’a jamais été indépendant avant la destruction de l’URSS en 1991 – a été profondément divisé entre est et ouest depuis toujours. Comme l’explique Andrew Murray dans L’empire et l’Ukraine, les gouvernement ont changé de mains au fil des élections mais le gagnant a toujours été un oligarque de l’est ou de l’ouest, et le vote se répartissait essentiellement de manière géographique.
Yanukovitch était un oligarque dont le Parti des Régions tenait sa base à l’Est. Son prédécesseur, Youtchenko était soutenu par l’ouest. Et le renversement de Yanukovitch a été perçu à travers l’Ukraine comme un renversement de la victoire électorale de l’est russophile au profit de la domination de l’ouest bien plus pro UE.
Beaucoup en Ukraine occidentale soutiennent l’accord d’association avec l’UE mis en œuvre par le gouvernement putchiste – mais les communistes ukrainiens constatent que les résultats ont été désastreux. Depuis la signature de cet accord, l’économie ukrainienne est en chute libre.
Quand Yanukovitch est tombé, un dollars US valait 8 Hryvnia la monnaie ukrainienne. Désormais il en vaut 27. Les prix ont explosés et l’agriculture et l’industrie souffrent alors que le pays luttent pour satisfaire aux prescriptions de l’UE et du FMI. 7 millions d’ukrainiens sont désormais au chômage et la moitié de la population ne peut plus payer son loyer.
Les communistes ukrainien dénoncent le « génocide sociale » impulsé par le nouveaux gouvernants. Si le Maidan a conduit l’Ukraine a un désastre économique, ses conséquences sociales sont encore plus sinistres.
Les bataillons paramilitaires lachés par le gouvernement pour exterminer la résistance dans l’est utilisent ouvertement des symbos nazis et appellent à la guerre contre les « Russes, les communistes et les juifs » dans une propagande que l’on reconnait instantanément comme celle du IIIe Reich.
Ces troupes de choc de la droite ukrainienne se sont rendues coupables de crimes de guerre, et notamment de torture, d’assassinat de civils, dans l’est de l’Ukraine, comme cela a été documenté par des associations et notamment Amnesty International. Ils ont pourtant reçu de l’argent et de l’entrainement de la part des militaires des Etats de l’OTAN, Grande Bretagne y compris.
Mais elles ont aussi pris place aux postes clés de l’appareil de sécurité de l’état, et encore très récemment à l’image de l’ancien commandant en chef du bataillon fasciste Azov Vadim Troyan devenu chef de la police nationale ce mois.
Ce ne sont pas des détails de ce qui se passe dans la nouvelle Ukraine, mais bien des éléments clés pour réécrire l’histoire et forger et inventé une identité nationale à l’image de la droite, un récit déformé qui a dérapé quand l’ancien premier ministre Arseni Yatsenuk a proclamé que l’Union Soviétique avait envahi l’Allemagne Nazie durant la seconde guerre mondiale;
L’embardée ukrainienne vers l’extrême droite inclut des tentatives d’interdire le Parti communiste. Une loi de « décommunisation » a interdit l’utilisation de symboles communistes et a criminalisé toute référence positive à l’Union soviétique ; des monuments aux anciens combattants de l’Armée rouge qui ont combattu les envahisseurs nazis et les statues de l’ère soviétique ont été abattues à travers tous le pays.
Le Parti Communiste d’Ukraine est loin d’être une force politique insignifiante : il était le troisième plus grand parti du pays avant Maidan, obtenant 13% des suffrages aux élections et plus de 3 millions de votes en 2012. Les nouveaux maitres de l’Ukraine ne sont pas prêt à l’affronter démocratiquement – il est maintenant interdit de participer aux élections par un décret du ministre de la justice. Le parti n’est pas encore totalement illégal : un procès l’interdisant a bien eu lieu devant un tribunal de Kiev, mais il demeure autorisé durant la procédure d’appel. [Ndt La commission de Venise a rendu un avis déclarant comme violant les principes démocratiques l’interdiction du parti communiste le 21 décembre 2015]
Cependant, il fonctionne avec de très sévère restrictions. Sa voix est totalement censuré par les médias. Lorsqu’on les mentionne, les communistes sont dépeints comme des séparatistes et des marionnettes russes. L’incapacité d’utiliser les symboles communistes, de distribuer la littérature communiste [NdT la junte a bloqué le dépôt légal du journal du KPU] ou de dire quelque chose de positif sur les traditions socialistes et communistes de l’Ukraine est paralysante. Et le harcèlement et la persécution de l’État ont été implacables. Des poursuites pénales ont été ouvertes contre plus de 400 communistes.
Les membres du parti peuvent être enlevés – disparus – sans aucune forme de procès ; un membre du KPU a disparu pendant plus d’un an avant que le parti ait pu découvrir ce qui lui était arrivé, en vérifiant de façon exhaustive la liste des détenus dans le pays.
La dirigeante du parti à Kharkov Alla Alexandrovskaya, une femme de 67 ans en mauvaise santé, a été détenue sans jugement pendant des mois. Les locaux ont été pillés, les biens détruits. Et dans le récit public, les communistes sont déjà interdits.
Les communistes ne sont pas les seules victimes de la nouvelle Ukraine. Les politiciens liés à l’ancien parti de Ianoukovitch sont morts dans des circonstances suspectes: la liste comprend Oleg Kalashnikov, Oles Bunya, Mikhaïl Chechetov, Stanislav Melnik et beaucoup d’autres.
Le gouvernement ne montre aucun intérêt à rendre justice pour les victimes de la violence et des meurtres d’extrême droite, qu’il s’agisse de civils dans les zones de guerre de l’Est ou de 48 personnes brûlées par des incendiaires d’extrême droite dans la Maison des syndicats d’Odessa le 2 mai 2014 .
Mais ce sont bien les communistes qui sont frappés par la répression la plus forte, déterminée et ciblée du régime ukrainien. En partie parce que le Parti des Régions s’est auto dissous; le parti le plus important opposé au coup d’état étant alors le Parti communiste.
Mais plus que cela, les communistes défendent une politique de classe que les forces ultra-droites qui dominent l’Ukraine doivent exterminer pour mener à bien leur objectif d’attacher le pays à l’impérialisme américain via l’UE et l’OTAN.
Les communistes ont lutté contre la militarisation de l’Europe de l’Est et ils s’opposent à l’accumulation actuelle de troupes de l’OTAN en Ukraine. Ils font aussi campagne pour la paix dans l’est de l’Ukraine, où la guerre du gouvernement d’extrême droite contre la population locale a tué des milliers de civils et déplacé deux millions de personne, sur la base des accords de Minsk II.
L’avenir de l’Ukraine paraît sombre à moins que le Parti communiste ne réussisse à pousser des élections vraiment libres dans lesquelles la gauche peut s’organiser et participer. Les communistes ukrainiens ont besoin de notre solidarité et du soutien du mouvement syndical ici contre le tsunami de la répression étatique qui engloutit leur pays.
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Cet article est issu de conversation avec des amis ukrainiens du Morning Star qui ne peuvent pas être nommés dans le contexte actuel. Une interview du leader du KPU Petro Symonenko est à parraître.. Traduction JBC pour www.initiative-communiste.fr depuis l’anglais
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https://www.morningstaronline.co.uk/a-5d23-Dark-days-for-the-forces-of-Ukraines-left#.WDNzwVwgHoE