
Articuler tous les fronts au service de l’Alternative Rouge et Tricolore
Par Fadi Kassem, secrétaire national du PRCF
Le 03/07/2025
Cessez-le-feu précaires, situation géopolitique délétère
La récente guerre déclenchée par Israël contre l’Iran a été proche de faire sombrer le monde dans l’engrenage infernal d’un conflit généralisé, davantage encore après que les États-Unis ont bombardé trois sites nucléaires iraniens. Certes, un cessez-le-feu a fini par être accepté par les deux parties ; mais la situation n’en demeure pas moins précaire, et pas seulement dans le cadre des relations israélo-iraniennes. En effet, non seulement le Moyen-Orient – où, rappelons-le, les palestiniens continuent de subir un génocide à Gaza et une colonisation meurtrière en Cisjordanie – demeure une importante poudrière du Golan au Yémen en passant par le Liban. Mais plus largement, le « grand rift » s’étirant de l’Arctique – où les États-Unis lorgnent sur le Groenland et le Canada – à la péninsule coréenne en passant par la Baltique, le Donbass, l’Afrique centrale, le détroit d’Ormuz et la mer de Chine concentre l’essentiel des tensions mondiales susceptibles de dégénérer, d’une manière ou d’une autre, en une conflagration mondiale. A quoi s’ajoutent les agressions répétées de l’impérialisme états-unien à l’encontre des régimes progressistes d’Amérique latine – à commencer par Cuba socialiste, le Nicaragua sandiniste et le Venezuela bolivarien – et la course au réarmement impulsée par l’OTAN, dont le dernier sommet a débouché sur l’engagement de tous les pays membres (sauf l’Espagne) de porter leur effort de guerre à 5% du PIB d’ici 2035. Le signal est donc très clair : d’ici 10 ans, la Troisième Guerre mondiale peut bel et bien éclater.

Une situation révélant les contradictions des BRICS…
Dans ce contexte belliciste anxiogène, les contradictions ne cessent de s’aiguiser, et déjà au niveau international. Le cas le plus emblématique (et finalement pas si contradictoire que cela) est celui de Donald Trump, présenté comme un « homme de paix » par des forces réactionnaires – voire de prétendus « marxistes » – hostiles à un Joe Biden fauteur de guerres. Il n’est qu’à voir l’allié pakistanais qui a proposé d’attribuer le prix Nobel de la paix à Donald Trump ! Pourtant, c’est bel et bien ce dernier qui a donné carte blanche à Israël pour anéantir Gaza – et y ériger une future « côte d’Azur du Moyen-Orient » après une massive déportation de la population palestinienne –, annexer le Golan, faire de Jérusalem sa capitale ou bombarder l’Iran. C’est ce même Trump qui, outre le Groenland et le Canada, souhaite mettre la main sur le canal de Panama – après avoir rebaptisé le golfe du Mexique en « golfe d’Amérique » sur Google aux Etats-Unis ; ou qui mène la guerre commerciale à la Chine et à l’Union européenne, supposément alliée et fidèle vassale.
Les contradictions sont cependant bien plus importantes au sein des dits « BRICS », désormais au nombre de dix. Présentés comme un bloc contre-hégémonique s’opposant à l’ordre impérialiste états-unien et à ses supplétifs, ce « bloc » n’en demeure pas moins traversé par des contradictions susceptibles de servir les intérêts de l’hégémonisme. En effet, non seulement s’y trouvent des alliés réactionnaires (Egypte et Emirats arabes unis) voire islamistes (Pakistan) des Etats-Unis, peu enclins à s’opposer à ces derniers en cas de guerre mondiale ; non seulement s’y trouvent des pays hostiles aux Etats-Unis mais dont les régimes intérieurs sont contre-révolutionnaires comme en Russie, voire archi-réactionnaires comme en Inde et en Iran. Mais en plus ce bloc est travaillé par des jeux d’alliances aiguisant les rivalités voire les tensions : que l’on songe à la récente confrontation indo-pakistanaise alimentant un conflit vieux de 80 ans. Que l’on songe, plus encore, au rôle pivot stratégique de l’Inde : important client de Moscou dans les achats d’armement, membre des BRICS et de l’Organisation de Coopération de Shanghai (née en 2001 et qui constitue un grand bloc incluant également la Chine, la Russie, le Pakistan et l’Iran), elle n’en demeure pas moins un allié important des Etats-Unis dans la cadre du « Dialogue quadrilatéral pour la sécurité » (incluant également le Japon militariste et l’Australie) et du forum « I2U2 » (Inde, Israël, Etats-Unis et Emirats arabes unis). Dès lors, difficile d’imaginer que les BRICS, au sein desquels la Chine apparaît à la fois comme un moteur et une menace, puissent constituer un tout suffisamment solide et cohérent pour résister à l’hégémonisme états-unien. Il n’est d’ailleurs qu’à voir les réactions du Pakistan et de l’Inde (qui a brillé par son silence) après l’agression de l’Iran.
… et celles des forces politiques établies en France
Les contradictions sont tout autant spectaculaires en France, ce que révèlent les positions des partis établis au sujet de l’actuelle dynamique géopolitique ; positions qui vont parfois à l’encontre des principes politiques de base (du moins ceux affichés et/ou revendiqués) de ces partis. A tout prendre, seule la Macronie, qui a décidé de mener la fuite en avant vers la guerre généralisée – souvenons-nous du plan de 413 milliards d’euros annoncé le 20 janvier 2023, soit le lendemain de la première grande manifestation pour la défense des retraites –, fait preuve d’une remarquable cohérence : combinant « saut fédéral européen », casse des conquêtes sociales et des services publics, réarmement au service des « conflits de haute intensité » et progressive fusion avec la droite réactionnaire et fascisante, elle se pose en avant-garde de la « défense des libertés, de la démocratie et des valeurs occidentales ». Une position dont la traduction politique très concrète est : « l’argent pour la guerre, pas pour les salaires ». A un moindre degré, les LR dans leurs différentes composantes (Ciotti, Wauquiez, Retailleau…) ont le même positionnement.
En revanche, toutes les autres formations politiques brillent par leurs contradictions :
- C’est d’abord le cas du prétendu « Rassemblement national », dont certains de ses électeurs croient qu’il défend le Frexit pourtant jeté aux oubliettes depuis belle lurette puisque le RN ne veut sortir ni de l’euro, ni de l’UE, ni même de l’espace Schengen (alors qu’ il se présente en champion de l’arrêt de l’immigration !). Un RN qui, tout en prétendant affirmer défendre les intérêts de la France, s’affirme de plus en plus sûrement dans l’alignement euro-atlantique, comme le révèle le soutien inconditionnel à Israël (Reconquête d’EricZemmour assumant, de son côté, pleinement qu’il s’agit d’un combat pour la « défense de la civilisation judéo-chrétienne ») dans sa guerre contre les Palestiniens ou l’Iran ou, plus significatif, son refus de s’opposer au soutien militaire, financier et humain au régime pronazi de Kiev le 5 mars dernier. Tout comme, sur le plan intérieur, le révèle son refus de faire tomber le gouvernement Bayrou qui s’apprête pourtant à opérer une saignée historique sur les travailleurs afin d’assurer le financement de l’effort de guerre…
- C’est également le cas des forces « souverainistes » de droite qui appellent à la paix et l’indépendance de la France… mais sont des avocats invétérés de Donald Trump, justifiant tous ses faits et gestes en dépit de tout ce qui a été rappelé précédemment. Florian Philippot, François Asselineau (qui comparait l’élection de Trump en novembre 2024 à un « événement historique comparable à la chute du mur de Berlin » !) et consorts, qui appellent à la sortie de l’OTAN, ont dû apprécier le fait que leur champion vient de se réjouir du succès du sommet de l’OTAN. Tout comme ils ont dû savourer que « l’homme de paix » Trump ait une réunion « positive » avec Volodymyr Zelensky et n’a pas fermé la porte à la livraison d’armes au régime pronazi de Kiev. Tout comme ils ont dû encore plus se délecter de la déclaration finale du sommet de l’OTAN de La Haye dans laquelle les pays réaffirment leur « engagement indéfectible en faveur de la défense collective, consacré par l’article 5 du traité de Washington, qui dispose qu’une attaque contre l’un des alliés est considérée comme une attaque dirigée contre tous. », ce qu’a totalement approuvé Donald Trump…
- C’est enfin le cas de la « gauche » établie. Sans même parler de Raphael Glucksmann, du PS et d’EELV, champions de la croisade euro-belliciste contre la Russie et de la guerre contre l’Iran au nom du combat contre les mollahs, ces contradictions sont aussi béantes au sein du PCF et de LFI. Si leurs députés ont, le 5 mars dernier, rejeté avec raison une résolution de l’Assemblée nationale visant à renforcer le soutien au régime pronazi de Kiev (résolution au sujet de laquelle, rappelons-le, le RN s’est abstenu) et si ces formations ne cessent, depuis quelques mois, d’appeler à la paix – jusqu’à s’approprier sans scrupules le mot d’ordre lancé en septembre 2022 par le PRCF : « L’argent pour les salaires, pas pour la guerre ! » –, elles n’en demeurent pas moins membres d’une coalition électoraliste qui a redonné une nouvelle vie à un PS en état de mort clinique en mai 2022 et qui, dans sa version « Nouveau Front populaire », défend dans son programme la… « livraison d’armes nécessaires à l’Ukraine » ! C’est que, par une étrange association, nombre de leurs membres – et déjà leurs états-majors refusant toute sortie de l’UE atlantisée qui a pourtant annoncé il y a quelques mois un immense plan de 800 milliards d’euros pour nourrir l’économie de guerre et qui œuvre à la constitution d’une « Europe de la Défense » – assimile le combat de l’Ukraine à celui des… Palestiniens. Apparemment, ils ne sont pas au courant que le Conseil régional des Hauts-de-France – dirigé par Xavier Bertrand – arbore, côte-à-côte, les drapeaux de l’UE, de l’Ukraine et… d’Israël. Rien d’étonnant quand on sait que cette « sainte Trinité » est celle défendue par la Macronie et, plus généralement, par tous les européistes et occidentalistes désireux de mener le combat contre le reste du monde pour conjurer le spectre d’un grand déclin à l’échelle mondiale.
Ainsi, serait-il « possible » d’armer l’Ukraine et en même temps de défendre les Palestiniens ; de combattre l’économie de guerre et en même temps d’applaudir à « l’autonomie européenne de défense » comme l’a fait Fabien Roussel début mars – de quoi favoriser une « Europe de la défense » que rejetèrent pourtant le 30 août 1954 les gaullistes et… les communistes ; de vouloir sortir de l’OTAN et en même temps de refuser de sortir de l’UE – qui est pourtant son partenaire stratégique depuis 2002 –, voire, comme Manon Aubry en avril 2024, de déclarer que la France devrait agir dans le cadre de l’OTAN en cas d’attaque russe contre la Pologne. Comprenne qui pourra…
De multiples fronts contradictoires…
Face à cette situation géopolitique et politique pétrie de contradictions et de plus en plus menaçante, le devoir de tout militant communiste est de parvenir à articuler l’ensemble des fronts de manière cohérente, hiérarchisée et dynamique. En effet, l’articulation de l’ensemble des fronts énumérés ci-dessous ne saurait être figée mais, par définition, s’adapte aux évolutions structurelles et conjoncturelles extérieures et intérieures, mais sans jamais renier l’objectif majeur : le renversement de l’ordre capitaliste et la construction du socialisme-communisme de nouvelle génération. Tâche délicate face à la nécessité d’associer l’ensemble des fronts suivants :
- Le front anti-exterministe. Il s’agit tout simplement du front de la paix et, plus encore, de la vie contre la dynamique mortifère de l’ordre capitaliste-impérialiste. C’est le sens de la formule des dirigeants ouest-allemands déclarant en 1984 : « Lieber Tot als Rot ! » (« Plutôt morts que rouges ! ») Ce qui ne signifie pas cependant que la destruction soit l’apanage des seuls Etats-Unis : après tout, si la Russie décide d’utiliser la première l’arme nucléaire, elle enclencherait la spirale infernale, quand bien même elle subit l’encerclement toujours plus agressif des Etats-Unis. Déjà à la fin de l’année 1962, Mao Zedong, adoptant une fuite en avant maximaliste, affirmait dans Le Quotidien du peuple : « Si les impérialistes veulent absolument faire la guerre, nous ne pourrons faire autrement que de nous résoudre à les écraser. Certes, si une guerre atomique éclate, la moitié de la population du monde sera peut-être anéantie, mais il reste encore l’autre moitié. L’impérialisme serait alors liquidé et le monde entier socialiste » Dans le cas présent, Mao manque d’une lucidité dont il a pourtant fait preuve bien plus tôt en analysant les contradictions inter-impérialistes et en proposant une stratégie de front.
- Le front anti-hégémonique. Il s’agit de l’affrontement entre l’ordre euro-atlantique avec, à sa tête, les Etats-Unis flanqués de leurs supplétifs (UE, Canada, Australie et Nouvelle-Zélande, régime bandériste ukrainien, « théocratie fasciste » israélienne, Japon et Corée du Sud militaristes…) et des anciens pays dits « du Sud » avec, à leur tête, les BRICS – et plus spécifiquement la Russie et la Chine. Si ce bloc – rappelons-le, pétri de contradictions – peut affaiblir et contrarier l’hégémonisme états-unien, nous aurions tort de le déplorer et de ce point de vue, il est souhaitable que partout où c’est possible, l’ordre euro-atlantique subisse des défaites militaires, diplomatiques et économiques.
- Le front anti-obscurantiste. Il se distingue des deux précédents tout en s’y rattachant par le fait que, dans le monde entier, l’esprit scientifique et le principe même du genre humain est attaqué. Ce front est cependant riche en subtilités et ne saurait se réduire à un affrontement entre des pseudo « démocraties éclairées » et un « reste du monde barbare », comme aiment l’affirmer les tenants de l’ordre euro-atlantique. D’une part, parce que la plupart de leurs dirigeants, qu’ils soient réactionnaires forcenés comme Donald Trump ou Benjamin Netanyahou ou pseudo « progressistes » comme Emmanuel Macron s’attaquent aux Lumières – Trump et Netanyahou battant cependant des records en matière d’obscurantisme. D’autre part, parce qu’il existe des forces rationnelles et favorables aux Lumières dans le bloc anti-hégémonique – à commencer par les forces communistes –, elles-mêmes cependant en proie à des offensives réactionnaires dans leur propre pays : l’Inde de Modi, la République islamique d’Iran ou l’Egypte de Sissi ne sont certainement pas des modèles de promotion du genre humain, tout comme la Russie de Poutine demeure un régime fondamentalement contre-révolutionnaire. Enfin, parce que même parmi les forces dites « progressistes » se développent des discours essentialistes contraires à l’idée de genre humain, contribuant à « communautariser » les populations en « musulmans », « Noirs », « Blancs », « Juifs », « femmes », « homosexuels », etc.
- Le front anti-impérialiste. Ce front recoupe en partie le front anti-exterministe. Mais en partie seulement : peut-on raisonnablement ranger l’Inde de Modi, la République islamique d’Iran ou la Russie en régimes anti-impérialistes alors même que les forces communistes y subissent – plus ou moins vigoureusement selon les périodes – une féroce répression ? De ce point de vue, il faut plutôt se tourner vers les régimes bolivariens d’Amérique (à commencer par Cuba), la République populaire démocratique de Corée (par ailleurs actrice importante du front anti-hégémonique) voire, si elle se décide à jouer son rôle de moteur pour la renaissance d’un véritable mouvement communiste international, la République populaire de Chine. Un front qui, lui aussi, n’est pas dépourvu de contradictions : les tensions internes au Venezuela entre le pouvoir maduriste, résolument anti-impérialiste, et les communistes désormais divisés en deux tendances (pro et anti-Maduro) témoignent des contradictions internes susceptibles de fragiliser le front anti-impérialiste. Car ce front ne peut fonctionner que si les forces communistes, forcément associées à d’autres (y compris petites bourgeoises), jouent le rôle moteur en son sein.
- Le front antifasciste. Il s’agit là encore d’un combat international que mena l’Internationale communiste dans le cadre de la stratégie des « Front populaires ». Et là encore, les contradictions ne manquent pas à l’échelle internationale. En effet, comment ne pas voir que l’extrême droite est au pouvoir en Inde depuis l’arrivée de Narendra Modi, impulseur en chef des pogroms ayant frappés les Indiens musulmans depuis des décennies ? De la même manière, comment ignorer l’existence de milices d’extrême droite dans la Russie actuelle ? Il n’en demeure pas moins que la fascisation est avant tout le résultat de l’offensive de l’Axe UE-OTAN, principal vecteur de fascisation, et que de ce point de vue compte le positionnement par rapport à la dynamique mondiale. C’est ainsi que ce se résout la contradiction russo-ukrainienne : d’un côté, l’Ukraine, un régime structurellement sous influence des milices néonazies, transformant un ancien collaborateur pronazi et antisémite notoire – Stepan Bandera – en « héros national », interdisant 14 partis de gauche – à commencer par le Parti communiste d’Ukraine – et appuyé par les résolutions toujours plus négationnistes de l’UE assimilant honteusement le communisme au nazisme (résolutions votées par les « socialistes » et « écologistes » aux côtés de l’ensemble des droites) ; de l’autre, la Russie issue de la contre-révolution de 1989-1991 mais qui se retrouve obligée de défendre l’héritage soviétique (tout en critiquant particulièrement le léninisme) et où le Parti communiste (KPRF) constituait la principale force d’opposition intérieure jusqu’à l’intervention en Ukraine.
La ligne de classe marxiste-léniniste, seule boussole pour une Alternative révolutionnaire
Il y a de quoi perdre son latin face à une telle situation. Sauf si l’on se rattache à la seule boussole idéologique et politique qui permet de résoudre ces contradictions : le marxisme-léninisme et la perspective de renversement de l’ordre capitaliste dans son entièreté. Ce qui implique à la fois de combattre « l’ennemi principal qui est dans notre propre pays » (comme l’affirmait déjà Karl Liebknecht à la veille de la Première Guerre mondiale), d’articuler les fronts de manière hiérarchique et de louvoyer sans cesse, en adaptant l’articulation selon les évolutions conjoncturelles et structurelles. Plus lucide et matérialiste que dans ses propos de 1962, Mao Zedong expliquait ainsi la stratégie du Parti communiste chinois en 1940 :
« Nos principes tactiques consistent de même à tirer profit des contradictions, à gagner la majorité, à lutter contre la minorité, à anéantir les adversaires un à un. En politique extérieure, nous différons du Guomindang. Le Guomindang prétend : « Il n’y a qu’un seul ennemi, tous les autres sont des amis » ; il donne l’impression de traiter tous les pays, à l’exception du Japon, sur un pied d’égalité, mais il s’oriente en fait vers l’Angleterre et les Etats-Unis.
Quant à nous, nous devons faire des distinctions. La première, entre l’Union soviétique et les pays capitalistes ; la deuxième, entre l’Angleterre et les Etats-Unis, d’une part, l’Allemagne et l’Italie, d’autre part ; la troisième entre les peuples d’Angleterre et des Etats-Unis et les gouvernements impérialistes de ces deux pays ; la quatrième, entre la politique de l’Angleterre et des Etats-Unis à l’époque du Munich d’Extrême-Orient et leur politique actuelle. C’est sur ces distinctions qu’est fondée notre politique. »
Dans la perspective du Frexit progressiste et avec l’objectif d’œuvrer à une Alternative Rouge et Tricolore, les militants du Pôle de Renaissance communiste en France doivent tirer les enseignements des diverses expériences – « Front uni » de Lénine, « Front populaire » lancé par le 7e congrès du Komintern en 1935, « alliance des quatre classes » de Mao – pour faire face aux défis de notre époque. Très concrètement, cela donne le schéma de base suivant :
- Dans l’état actuel des choses, priorité absolue au combat pour la paix mondiale, ce qui implique de privilégier les fronts anti-exterministe et anti-hégémonique, en espérant le plus large affaiblissement du bloc euro-atlantique. En ce sens, toute défaite des Etats-Unis ou de leurs alliés – sur le front de l’Est, au Moyen-Orient, en Asie orientale ou ailleurs – est une excellente nouvelle à exploiter intérieurement. De même, toute action visant à empêcher l’envoi d’armes aux proxys – à l’image du magnifique blocus des dockers de Fos-sur-Mer contre l’expédition d’armes vers Israël – doit être encouragée. Et plus que jamais, l’opposition à l’ensemble des forces euro-atlantiques – et déjà Donald Trump, porte-parole martial de l’hégémonisme états-unien – doit être renforcée.
- Agir ainsi ne signifie pas apporter un blanc-seing aux régimes en place dans les pays hostiles à l’hégémonisme. C’est pourquoi le PRCF soutient le combat du KPRF en Russie, du parti Toudeh en Iran ou encore. des forces communistes en Inde. Car le souhait d’une vaste défaite militaire de l’Axe euro-atlantique ne saurait signifier un alignement politique et idéologique sur les régimes anticommunistes en place : après tout, Vladimir Poutine a réprimé les forces communistes après les élections de septembre 2021, tandis que l’ancien président iranien Ebrahim Raïssi s’était « distingué » par des massacres anticommunistes en 1988. Pas plus que l’alignement politique inconditionnel n’est possible sur des régimes a priori progressistes où les communistes ont subi des attaques inacceptables, comme au Venezuela – avec pour résultat, une scission du Parti communiste du Venezuela.
- Il n’en demeure pas moins que tout affaiblissement du bloc euro-atlantique a pour conséquence un élargissement des capacités de mobilisation et d’unification des forces progressistes dans un large front antifasciste et anti-impérialiste dans les pays constituant l’Axe UE-OTAN. C’est en ce sens que Lénine appelait au « défaitisme révolutionnaire » pour provoquer la chute des régimes réactionnaires lors de la Première Guerre mondiale. La Macronie ne s’y trompe pas, elle qui lance le pays dans une fuite en avant dans les « conflits de haute intensité » via notamment le « saut fédéral européen ». Refuser la guerre sur des bases populaires et patriotiques – et non en soutenant le belliciste Trump comme le font Philippot et Asselineau –, en s’alliant jusqu’aux formations gaullistes hostiles à l’ordre euro-atlantique et refusant l’envoi d’armes y compris au régime pronazi de Kiev, voici la perspective. Une perspective qui exclut toute alliance avec des forces réactionnaires ou fascisantes prétendument patriotiques.
- Ce refus de la guerre n’a cependant un sens que s’il s’inscrit dans le cadre du double combat pour la souveraineté nationale et l’émancipation sociale, comme l’affirmait déjà Jean Jaurès. En effet, affaiblir le bloc euro-atlantique nécessite avant tout d’affaiblir au sein de notre propre pays, là où nous pouvons agir concrètement, les forces poussant à la guerre. La Macronie et ses satellites avant tout bien entendu, mais aussi les forces faussement « souverainistes » de droite. Et pour cela, il est indispensable, comme le fait le PRCF, de réclamer de manière conséquente « l’argent pour les salaires, pas pour la guerre ! » : non pas en refusant de sortir de l’UE, « partenaire stratégique de l’OTAN » et machine de guerre antisociale et antidémocratique depuis ses origines, comme le font LFI et le PCF, mais bel et bien en promouvant le Frexitprogressiste.
Et pour que cette articulation reste l’apanage des communistes qui doivent jouer leur rôle historique d’avant-garde à un moment où le monde est à la croisée des chemins, il est indispensable d’agir dans le triple sens auquel travaille le PRCF depuis sa création, à savoir :

- Le reconstruction d’un Parti franchement communiste, rompant totalement avec le funeste « eurocommunisme » et avec l’alignement sur la « social-démocratie » (et déjà le « NFP » totalement déchiré et incapable d’empêcher la montée en puissance de l’extrême droite). Un parti qui ne soit pas un « mouvement gazeux » mais bien une formation disciplinée et rigoureuse régie par les principes marxistes-léninistes (dictature du prolétariat, centralisme démocratique, internationalisme prolétarien, etc.), seul à même de prendre la tête d’un large Front de résistance antifasciste, patriotique, populaire et écologiste (F.R.A.P.P.E.) afin d’éviter que ce dernier s’enlise dans les contradictions.
- La promotion d’un syndicalisme de classe, comme l’affirma l’Internationale communiste à sa création en mars 1919, hostile aux « jaunes » que sont aujourd’hui la Confédération européenne des syndicats (C.E.S.), la Confédération syndicale internationales (CSI) et les états-majors confédéraux des syndicats subordonnés à la mortifère stratégie du « dialogue social » défendue par la CFDT. De ce point de vue, s’adresser aux bases rouges (et pas seulement au sein de la CGT) pour mener des actions en faveur de la paix et de l’offensive de classe (une nouvelle fois, « l’argent pour les salaires, pas pour la guerre ! ») est une priorité majeure, y compris en affrontant les directions euro-confédérales estimant qu’on peut à la fois financer la guerre et les services publics – comme Sophie Vénétitay à la tête du SNES-FSU.
- Enfin, et surtout, pousser à la reconstitution d’un grand Mouvement communiste international pour pallier les contradictions toujours croissantes des BRICS, au moment où l’hégémonisme états-unien sort relativement renforcé de la séquence israélo-iranienne. Car il est désormais évident que les BRICS ne sauraient constituer une alliance solide et cohérente dans le cadre de l’affrontement prioritaire américano-chinois. Cela implique de renforcer les relations avec les partis communistes dans le monde entier et de travailler à partir d’une unité de principes (mais pas de ligne politique pouvant varier selon les situations nationales). De ce point de vue, en participant à des réunions désormais régulières associant plusieurs partis communistes d’Europe (PCPE, PC danois, Parti ouvrier hongrois, Parti communiste d’Allemagne – DKP, KPRF, Parti communiste de Suisse, etc.), le PRCF apporte sa pierre à l’indispensable reconstruction.
L’heure n’est plus aux demi-mesures ni aux contradictions béantes. Seule une ligne de classe ferme et conséquente comme le porte le PRCF – Alternative Rouge et Tricolore, F.R.A.P.P.E., Frexit progressiste – est en mesure de mener le combat le plus efficace contre l’hégémonisme états-unien et, plus généralement, contre le capitalisme exterministe. A l’heure où Donald Trump, flanqué de ses supplétifs, se réjouit de la relance de l’OTAN, des efforts des pays européens et de l’UE dans le réarmement et des succès d’Israël, le PRCF agira plus que jamais dans le sens de la rupture claire, cohérente… et révolutionnaire.