Nous avons soutenu la référence de J.-L. Mélenchon à l’ « indépendantisme français » lors de la dernière présidentielle. Mais l’UE étant verrouillée par ses traités constitutifs (elle s’y définit comme une « économie de marché ouverte sur le monde où la concurrence est libre et non faussée », ce qui institue un véritable totalitarisme capitaliste et néolibéral), par son inféodation structurelle à l’OTAN et par l’unanimité des Etats-membres qui est requise pour changer les traités supranationaux, toute mise en œuvre conséquente de l’alternative chère à J.-L. M. « l’UE, on la change ou on la quitte » devrait conduire à faire du prétendu « plan B » (le Frexit progressiste) le Plan… Alpha et Oméga d’une France Franchement Insoumise (FFI !) à l’UE du capital.
On est donc inquiet de voir certains milieux proches de la F.I. parler, tantôt de « Corse insoumise », tantôt d’ « Europe insoumise », comme si n’importe quel niveau territorial était également propice à l’insoumission. Mais insoumises à quoi, la Corse ou « l’Europe » ?
Une « Corse insoumise » ne pourrait l’être qu’à une République française une et indivisible. Il s’agirait donc, les rapports de forces continentaux actuels étant ceux qu’ils sont, d’une Corse encore plus soumise encore qu’aujourd’hui à l’UE germano-atlantique… et aux mafias immobilières et autres qui voient dans l’euro-séparatisme corse l’occasion de faire main basse sur le magnifique littoral insulaire. En outre cette « Corse insoumise » n’en serait que plus soumise… au « Pacte girondin » cher à Macron qui, avec son « droit constitutionnel à la différenciation » des collectivités territoriales, s’inscrit pleinement dans la « reconfiguration des territoires » que le MEDEF revendique dans son manifeste de 2011 intitulé Besoin d’aire.
Quant à l’ « Europe », elle n’est déjà que trop insoumise… aux peuples européens en général, et au peuple français en particulier. Tout flirt avec la revendication d’une « souveraineté européenne », indissociable du « gouvernement de l’euro » et de la « défense européenne insérée dans l’OTAN », ne pourrait donc qu’aggraver ce déni de démocratie qu’est une « construction » européenne qui ravage les acquis sociaux et les souverainetés nationales.
S’il s’agit de revendiquer l’ « insoumission » de l’UE à l’ordre états-unien, la revendication d’une « Europe insoumise » est, au minimum piégée : d’abord parce qu’elle ne sort « l’Europe » de l’orbite de Trump qu’en la précipitant dans celle du clan Obama-Clinton, non moins dangereux pour la paix.
Ensuite parce que les peuples, la classe ouvrière, la paysannerie et la paix ont tout à craindre de la guerre commerciale annoncée entre les USA et l’actuelle Europe sous pilotage allemand. Depuis des années, le PRCF explique que sous le masque du « libre-échangisme » mondial, l’euro est une monnaie crypto-protectionniste qui résulte d’un partage impérialiste entre l’emprise mondiale du dollar et la mainmise de Berlin, via la zone euromark (l’euro a été construit par alignement sur le mark) sur l’Europe de l’Est et sur l’Europe du Sud.
En gros, l’euro fort a longtemps limité l’importation de marchandises allemandes en Amérique et, tout en laissant aux Américains la monnaie mondiale de référence (un dollar faible), il permettait à la « République de Berlin » de concentrer à son profit l’industrie européenne sans avoir à craindre la dévaluation compétitive des Etats européens de l’Est, du Sud et de l’Ouest (la France). Or, la méga-austérité salariale que Berlin, aidé par ses vassaux des vampiriques Banques françaises, a imposé à la Grèce et aux autres Etats du Sud, France incluse, a rendu plus difficile la pénétration de ces marchés par l’industrie allemande : on n’étrangle pas impunément ses meilleurs clients ! Dès lors, la Banque de Francfort ayant fait tourner à fond la planche à billet, donc affaibli l’euromark, les marchandises allemandes, notamment les autos, ont inondé « traîtreusement » le marché états-unien, menaçant l’accord hyper-impérialiste qu’avaient passé les maîtres de la zone dollar et ceux de la zone mark. Bref, sous l’égide de Trump et de Merkel (à laquelle Trump refuse de serrer la main en public !), une guerre commerciale est ouverte qui cache mal les divisions au sein du camp américain lui-même. Nous ne pouvons entrer ici dans l’analyse détaillée de ces frictions.
Quoi qu’il en soit, les communistes, les travailleurs, les peuples, les « insoumis » eux-mêmes n’ont pas à « parrainer » l’un des deux camps impérialistes entrés en guerre politico-commerciale, en attendant peut-être pire. Ni à idéaliser le « protectionnisme »… bourgeois et encore moins, à faire l’union sacrée « anti-américaine » ou « antichinoise » avec leurs patrons « européens ». Qu’on le veuille ou non, le mot d’ordre d’ « Europe insoumise » nous rabattrait, nous les travailleurs, vers l’Europe allemande (alliée à Clinton/Obama) et donc, ce mot d’ordre alimenterait le discours supranationaliste sur la « gouvernance européenne », le « budget de la zone euro » et la « défense européenne » en occultant la lutte contre l’UE, pour la sortie de l’OTAN, pour en finir avec le sinistre euro (cette austérité continentale faite monnaie), pour reconstruire une France indépendante, amie de tous les peuples et « en marche »… vers le socialisme.
En 1914, l’internationaliste allemand Karl Liebknecht ouvrait une brèche dans la domination mentale de l’impérialisme quand, bravant le Kaiser, il s’exclamait avec Rosa Luxemburg et Clara Zetkin : « l’ennemi principal est dans ton propre pays » (der Hauptfeind ist in eignem Land !). C’est toujours vrai aujourd’hui où, non seulement les prolétaires, mais les patriotes de France doivent d’abord faire front contre Macron, ce commis impitoyable de la « Françallemagne » et de la « Franceurope » qui détruit méthodiquement tous les acquis sud CNR.
Nous devons dire aux impérialistes de ce côté-ci de l’Océan atlantique que les ouvriers américains ou chinois ne seront jamais nos ennemis et que l’insoumission générale à l’impérialisme sera d’autant mieux promue partout, que nous combattrons mieux les capitalistes là où nous résidons : l’ennemi principal est sur ton continent, camarade.
C’est pourquoi il faut sortir par la gauche de l’UE, et, sans cesser de combattre l’impérialisme US, il convient de refuser les slogans faussement « rebelles » qui, mettant l’insoumission à toutes les sauces, obscurcissent la lutte pour une France indépendante coopérant avec tous les continents et s’orientant vers la révolution socialiste.
En conséquence, la seule « Europe insoumise » que nous reconnaissions, nous militants franchement communistes, c’est l’Europe des luttes non pas dans, mais CONTRE l’UE du grand capital.
Tout est dit dans ce texte avec l’alliance des travailleurs et les enemis des peuples. Ceux d’ici et ceux d’ailleurs,